mardi 15 novembre 2011

Une aventure en fantastique







JEROME CAYLA, Mathilde




Jérôme Cayla joue avec les genres littéraires et s'en joue!

Tout commence par une rêverie inquiétante. Une jeune femme, Marie, a quitté Paris pour rejoindre la grande maison familiale, située au bord de l'Océan, avec l'intention d'y mettre de l'ordre et de désherber le jardin, de la préparer, en somme, à accueillir la famille pendant les vacances d'été.
Mais rien n'est plus pareil...malaise, inquiétudes, sensations étranges s'emparent d'elle. L'auteur plonge assez vite son lecteur dans une atmosphère fantastique. Marie se débat, résiste, elle est professeur de mathématiques!

Elle doit pourtant se rendre à l'évidence: la maison est le théâtre d'un phénomène étrange. Une apparition surgit, une fillette qui, de plus, l'interpelle.
On oscille entre un jeu subtil d'identification- Elle pouvait rester des heures ainsi, telle cette petite fille que Marie peut voir au loin devant elle, assise sur son ancien perchoir- et le recours à la rationalité ordinaire- Elle se demande d'abord pourquoi la fillette n'est pas à l'école, sa région n'est pas encore en congés-...mais, avec à propos, l'hésitation se résout dans une remarque réaliste: Où diable, a-t-elle été s'habiller? L'humour du narrateur refoule le fantastique...qui tient bon, cependant. C'est que la fillette n'est pas vêtue à la dernière mode, en effet...tableau ancien, vieille photographie.
Elle nous entraîne à sa suite, en 1852. Elle s'appelle Mathilde. De Ma-rie à Ma-thilde, l'identification se poursuivrait-elle?

On se croit un instant dans un roman paysan, régionaliste, impression de courte durée. C'est l'aventure qui commence!

Changeant de genre, bousculant les conventions, Jérôme Cayla nous livre un authentique roman d'aventure. La Fringante s'éloigne des côtes bretonnes et file, toutes voiles dehors, vers l'Afrique, avec, à son bord, de nouvelles recrues parmi lesquelles se cache Mathilde. Une jeunette de 13 ans sur un navire! La vérité ne tardera guère à éclater.

Nous croisons dans l'équipée de rudes matelots, pleins de tendresse, des pirates sans scrupules, prêts à fournir en jeunes demoiselles les harems d'Orient, de pieux musulmans, loyaux et prévenants et tant d'autres personnages. De péripéties en émotions fortes, l'auteur met notre attention à rude épreuve et l'on se perd parfois, quand on a arrêté sa lecture la veille à un point crucial du récit et qu'on y revient le lendemain, désorienté. Malicieux narrateur qui nous oblige à relire les pages précédentes.!

Mais un autre roman s'écrit en parallèle, car, à terre, en Bretagne, l'histoire, amorcée par Mathilde et abandonnée par elle, se poursuit...roman de mœurs, roman psychologique.

Les ramifications du récit trouveront leur solution dans un épilogue à la fois dramatique et porteur d'espérance.

Et Marie? On l'avait presque oubliée. C'est le retour au temps présent et à la maison familiale des bords de mer. Un deuxième épilogue nous attend au cœur de la maison,dans un lieu resserré, étroit, bien loin des espaces infinis des océans.

Gageons que Jérôme Cayla s'est beaucoup amusé en écrivant Mathilde. C'est un roman jubilatoire qui laisse en nous des interrogations littéraires: Marie a-t-elle rêvé? Où sont les limites du réel? Et si c'était vrai?



JEROME CAYLA, Mathilde, Laura Mare Editions, 2010







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