LE CAS JEKYLL AU THEATRE DE LA CRIEE
de Christine Montalbetti
mise en scène de Denis Podalydès, Emmanuel Bourdieu et Eric Ruf
( deuxième version)
avec un acteur Denis Podalydès
et une danseuse Kaori Ito
Hier soir, c'était, au Théâtre de La Criée, à Marseille, la dernière représentation du Cas Jekyll et la dernière chance d'assister à un spectacle superbe d'inventivité et de brio.
Christine Montalbetti a écrit Le cas Jekyll, publié aux Editions P.O.L. Il s'agit d'une adaptation pour le théâtre de la nouvelle de Stevenson, Docteur Jekyll et Mister Hyde, écrite en 1886. L'adaptation est faite à l'intention de Denis Podalydès.
Le monologue du Docteur Jekyll est écrit dans une langue qui se métamorphose avec le personnage.
D'abord d'une facture classique impeccable, elle convient au Docteur conférencier, analysant avec rigueur et méthode le cas scientifique qui l'occupe et dont il est le centre. Cette prose savante et élégante est émaillée de formules familières, de remarques "décalées" qui font le bonheur du spectateur.
On entend dans la salle des rires discrets, on apprécie l'humour d'un personnage menacé par la tragédie, on souffle un peu alors qu'une atmosphère menaçante se met en place.
Mais la langue bafouille, se délite et se perd dans la confusion de l'être pour disparaître bientôt dans des borborygmes, des grognements, des halètements et des souffles inquiétants. Hyde a pris le dessus. On a cru Jekyll maître de la situation, il finit en bête recluse et velue!
Quelle prouesse que ce jeu d'acteur en métamorphose permanente! Jekyll n'attendait qu'une plume pour devenir enfin lui-même, un vrai personnage de théâtre, se transformant sans cesse et cherchant son identité dans ce vertige de soi.
Denis Podalydès a une alliée, une complice, son double et son alter ego, la danseuse Kaori Ito. Sa première apparition est fantastique, au sens littéraire du terme...elle prend la peau de Jekyll, s'introduit dans son enveloppe charnelle et le laisse à terre! Elle virevolte et saute et suit Jekyll comme son ombre et gémit aussi et souffre. Car elle est bien plus que Hyde, elle est l'âme souffrante de Jekyll.
Si le corps de l'acteur et celui de la danseuse sont d'abord bien dissociés sur la scène, ils finiront par se confondre et l'on voit la souple et malléable Kaori s'enrouler autour de Jekyll, lui "coller à la peau", ne le lâcher jamais et Jekyll la porter avec aisance comme on porte un manteau.
Le manteau de Jekyll en effet...pour s'y réfugier, y cacher Hyde... l'acteur le jette et le passe à la danseuse, magnifique symbole de la métamorphose...l'habit fait-il le moine?
Le vêtement...le langage...on s'y cache? On s'y révèle?
Le manteau et les voiles de Kaori s'envolent dans un décor où se jouent l'ombre et la lumière. Un cercle lumineux permet au début du spectacle de représenter l'apparence, brillante et avouable, et la vérité, secrète et honteuse. Denis Podalydès entre dans le cercle et en sort tour à tour, et bien souvent reste à mi chemin pour nous dire la duplicité, le double, la confusion révélatrice des êtres.
Décor de misère, lit branlant, table renversé, rideau déchiré...une porte s'ouvre et, derrière la paroi, se jouent des gestes mystérieux, se libère l'horreur. Nous sommes livrés à notre imagination, à nos propres fantasmes. Comme dans le théâtre classique du XVIIème siècle, la bienséance s'interpose!
Ce décor semble habité par une foule tant les métamorphoses qui s'opèrent sont multiples. L'acteur et la danseuse s'y coulent, s'effaçant et surgissant de tous côtés.
Et au moment de saluer leur public, on les verra disparaître derrière le mur de la chambre, l'un à droite, l'autre à gauche et réapparaître, le premier à gauche, la seconde à droite, et vice versa pendant un long moment. C'est qu'ils continuent à jouer...Hyde? Jekyll? Les deux faces de la même humanité.
On peut encore sur le site de La Criée voir défiler quelques images de ce spectacle "fantastique".
Le monologue du Docteur Jekyll est écrit dans une langue qui se métamorphose avec le personnage.
D'abord d'une facture classique impeccable, elle convient au Docteur conférencier, analysant avec rigueur et méthode le cas scientifique qui l'occupe et dont il est le centre. Cette prose savante et élégante est émaillée de formules familières, de remarques "décalées" qui font le bonheur du spectateur.
On entend dans la salle des rires discrets, on apprécie l'humour d'un personnage menacé par la tragédie, on souffle un peu alors qu'une atmosphère menaçante se met en place.
Mais la langue bafouille, se délite et se perd dans la confusion de l'être pour disparaître bientôt dans des borborygmes, des grognements, des halètements et des souffles inquiétants. Hyde a pris le dessus. On a cru Jekyll maître de la situation, il finit en bête recluse et velue!
Quelle prouesse que ce jeu d'acteur en métamorphose permanente! Jekyll n'attendait qu'une plume pour devenir enfin lui-même, un vrai personnage de théâtre, se transformant sans cesse et cherchant son identité dans ce vertige de soi.
Denis Podalydès a une alliée, une complice, son double et son alter ego, la danseuse Kaori Ito. Sa première apparition est fantastique, au sens littéraire du terme...elle prend la peau de Jekyll, s'introduit dans son enveloppe charnelle et le laisse à terre! Elle virevolte et saute et suit Jekyll comme son ombre et gémit aussi et souffre. Car elle est bien plus que Hyde, elle est l'âme souffrante de Jekyll.
Si le corps de l'acteur et celui de la danseuse sont d'abord bien dissociés sur la scène, ils finiront par se confondre et l'on voit la souple et malléable Kaori s'enrouler autour de Jekyll, lui "coller à la peau", ne le lâcher jamais et Jekyll la porter avec aisance comme on porte un manteau.
Le manteau de Jekyll en effet...pour s'y réfugier, y cacher Hyde... l'acteur le jette et le passe à la danseuse, magnifique symbole de la métamorphose...l'habit fait-il le moine?
Le vêtement...le langage...on s'y cache? On s'y révèle?
Le manteau et les voiles de Kaori s'envolent dans un décor où se jouent l'ombre et la lumière. Un cercle lumineux permet au début du spectacle de représenter l'apparence, brillante et avouable, et la vérité, secrète et honteuse. Denis Podalydès entre dans le cercle et en sort tour à tour, et bien souvent reste à mi chemin pour nous dire la duplicité, le double, la confusion révélatrice des êtres.
Décor de misère, lit branlant, table renversé, rideau déchiré...une porte s'ouvre et, derrière la paroi, se jouent des gestes mystérieux, se libère l'horreur. Nous sommes livrés à notre imagination, à nos propres fantasmes. Comme dans le théâtre classique du XVIIème siècle, la bienséance s'interpose!
Ce décor semble habité par une foule tant les métamorphoses qui s'opèrent sont multiples. L'acteur et la danseuse s'y coulent, s'effaçant et surgissant de tous côtés.
Et au moment de saluer leur public, on les verra disparaître derrière le mur de la chambre, l'un à droite, l'autre à gauche et réapparaître, le premier à gauche, la seconde à droite, et vice versa pendant un long moment. C'est qu'ils continuent à jouer...Hyde? Jekyll? Les deux faces de la même humanité.
On peut encore sur le site de La Criée voir défiler quelques images de ce spectacle "fantastique".